17A - Bruno - Petit matin
Le monde de la nuit, sentant le jour venir
S’est tu depuis longtemps.
L’horizon sans sommeil caresse mollement
L’azur marbré de rose et de jaune et de bleu.
Le brasier apparaît. Le voile évaporé
Veillant sur la campagne, lentement, lui fait place
Et la prairie parée de dentelles perlées
S’offre aux rais du levant filtrés par les feuillages.
Sur un chêne perché, un merle audacieux
Lance son chant ardent aux habitants des cieux.
Les parfums de la terre se réveillent et s’élèvent,
Se marient au hasard dans un air indolent :
L’humus au sapin vert, la menthe au chèvrefeuille,
Le baume des peupliers à la lavande mauve.
Que j’aime ces matins ! Que j’aime à contempler
Ces recommencements de la vie, de la terre
Et de ses habitants ! A ton tour, à pas lents
Tu sortiras bientôt de notre humble chaumière
Pour aller te poser sur notre banc de pierre,
Celui où tu aimais t’asseoir à mes côtés.
Tu lèveras les yeux pour admirer le ciel
Et ses couleurs de feu teinté d’or et de miel.
Tu tourneras la tête vers le chêne élancé
Dont je plantai jadis la graine prometteuse
Et son ombre apaisante, si large et généreuse
Où je demeure en paix, selon mon dernier vœu.